lundi 17 janvier 2011

A Coatéval et La Motte avant l'adduction.




Témoignage de Yvonne Bonnefoy à Lamotte.

Yvonne est née Riou le 14 octobre 1919 à Coatéval. Ses parents y possédaient une ferme de 15 ha. Elle a été pensionnaire pendant 5 ans à l'école Notre Dame des Victoires au bourg de Milizac. A presque 12 ans elle a été reçue au certificat d'études et 8 jours après elle est rentrée à la ferme pour de bon afin d'aider sa mère. Elle était l'aînée de 6 enfants et a donc contribué à élever ses 3 frères et ses 2 soeurs.
Pour la toilette la mère versait dans une bassine l'eau retirée du puits. Avec un genre de gant de toilette elle lavait les enfants. Ils n'étaient pas lavés entièrement bien souvent. Eux-mêmes se débarbouillaient la figure chaque matin et les mains et les bras avec du savon pour chaque repas.
Quand il y avait une grande occasion, les grands dimanches, pour des mariages ou des fêtes, on faisait une toilette plus importante. On prenait une grande bassine, du savon, un gant de toilette et une serviette, et on se retirait dans une grange.Pour les pieds et les jambes c'était assez sou
vent puisqu'on les salissait en trayant les vaches. Yvonne a commencé à traire à 7 ans. L'été les jambes étaient nues et facilement salies par la bouse. En sortant de la traite, matin et soir, on se lavait donc.Pour la lessive il fallait aller au lavoir du ruisseau de Kervern. Sur la berge du ruisseau, au bord du chemin menant à Kernogant, près du premier virage, on avait placé une pierre tombale sur laquelle on battait le linge. On appelait l'endroit "kichen ar poul dour" (à côté de la mare), sans doute parce qu'il était voisin de l'emplacement où on abreuvait les vaches. L'eau était froide car elle ne provenait pas directement d'une source comme pour le lavoir des Trois Curés.
Assez souvent la lessive se faisait en début de
semaine, surtout quand les frères et soeurs étaient pensionnaires. Il fallait que leur linge, qui était cherché le dimanche, soit de retour propre le dimanche suivant. Donc, en cas de mauvais temps, ça se faisait toujours au début de la semaine pour que le linge soit séché à temps et plié dans un panier.
Les frères d'Yvonne ont dû aller à la vieille mairie d'abord parce que l'école St Joseph n'était pas encore construite. Ils n'étaient donc pas pensionnaires mais dormaient au bourg quand même chez le menuisier Joseph Nicolas. Leur mère leur envoyait du beurre et leur linge.

Pensionnaire on ne rentrait à la maison que pour les vacances.Le puits de Coatéval profond de 11m et équipé d'une manivelle et d'un seau était excellent, il ne tarissait jamais. Selon Yvonne il est très ancien. Son eau était bonne toute l'année et on en faisait de la piquette avec des mûres, des prunelles et des glands. On plaçait les bouteilles dans le tas de foin pendant une quinzaine de jours pour que la boisson fermente. Le futur mari d'Yvonne, Laurent Bonnefoy, travaillait à la brasserie de Kérinou à Lambézellec et leur ramenait de la levure de bière pour leur piquette.L'été, un peu par caprice, les gens préféraient boire l'eau de la fontaine de Kernogant. Quand Yvonne et ses soeurs étaient petites on les envoyait avec des bouteilles pour rapporter cette eau. Yvonne se souvient d'avoir cassé une bouteille en tombant et d'avoir été bien grondée.
La fontaine de Kernogant se trouvait au bord du chemin Coatéval/Kernogant, au pied du virage avant la montée vers Kernogant. Les habitants de Kernogant y avaient installé un lavoir aussi.
Actuellement on peut y voir une construction, un abri en ciment qui, bizarrement, ne semble avoir aucune entrée.

Il aurait contenu le mécanisme du captage de la source réalisé par l'entreprise Bihan de Plouvien, quelques temps avant la mise en place de l'adduction dans la commune. Plusieurs fermes du voisinage étaient desservies, à l'exclusion de La Motte.
Les bêtes s'abreuvaient donc en bas au ruisseau de Kervern. Quatre fermes y conduisaient leurs vaches : les 2 Loguellou, La Motte et Coatéval. Il y avait parfois un peu de pagaille lorsque trop de vaches se retrouvaient là ensemble ! L'hiver les bêtes ne pouvaient pas sortir par temps de gel, alors il fallait puiser l'eau du puits. On la leur apportait tous les jours dans les crèches avec des seaux. Toutes les fermes faisaient de même.L'été les vaches broutaient dans les prairies et avaient de l'eau en suffisance dans les ruisseaux. C'était les prairies d'avant la COMIREN qui les a ensuite creusées en les transformant en étangs. Mais Yvonne se souvient qu'une fois elle avait dû abreuver des génisses assoiffées dans une parcelle. Et il lui avait fallu franchir plusieurs fois un champ fraîchement labouré en poussant sa brouette chargée de récipients pleins d'eau. Que de mal !Après son mariage le 18 septembre 1945, Yvonne est venue à La Motte où elle a pris une part active aux travaux des champs. Elle a participé à la plupart des travaux extérieurs, elle a beaucoup conduit les chevaux par exemple "J'en ai fait des kilomètres avec les chevaux, et avec des sabots de bois ! Quand la terre était humide elle collait aux sabots et il fallait souvent les cogner, clac-clac, pour la décoller !" Ensuite elle a pris le volant d'un tracteur.Mais il y avait aussi le travail de la maison, dont la lessive. Il n'y a jamais eu de lavoir en ciment près du puits à La Motte. Tout se faisait au lavoir du ruisseau ou à celui des Trois Curés. Yvonne est donc passée directement de ces lavoirs à la machine à laver en 1969 ou 1970. C'est sa fille Denise qui en a fait l'achat. Mais il fallait chauffer l'eau dans une marmite d'abord.
Le puits de La Motte a été contaminé pendant la guerre de 1914/18. L'arrière grand- père de La Motte était étalonnier, et marchand d'engrais. Deux étalons occupaient la grange juste à côté du puits et il y a sans doute eu infiltration de purin jusqu'à l'eau du puits. Trois personnes ayant consommé cette eau sont mortes de la typhoïde.Excepté cet épisode l'eau du puits ne posait pas de problème, sauf l'été parfois.La famille Bonnefoy n'a jamais installé de pompe électrique dans le puits. Quand il arrivait que l'eau ne soit pas bonne certains étés, Yvonne allait se ravitailler à la fontaine des Trois Curés avec une brouette. Elle transportait jusqu'à 60 l pour la cuisine.Dans les années 50, M. Bonnefoy a trouvé une citerne préfabriquée d'occasion à Brest. Transportée par camion elle a été installée au pignon de la maison pour recevoir l'eau pluviale du toit. Ceci a permis l'ajout d'un robinet sur évier dans la maison. Cette citerne a bien rendu service selon Yvonne.Il y avait 3 sources à Keramoal, avec un lavoir. Le ruisseau est alimenté par ces sources.
A Kervern il y avait encore une source et un grand lavoir pour 8 familles.Aux Trois Curés 4 familles lavaient leur linge au lavoir alimenté par la fontaine.
Il existait aussi plusieurs sources dans les prairies bouleversées par la COMIREN.Un moulin a existé autrefois sur le ruisseau de Kervern là où le chemin vers Kernogant le franchit sur ce qui devait être la chaussée-digue de retenue de l'étang. Un ancien passage d'eau est encore visible sous l'extrémité de la chaussée, côté La Motte.

La parcelle en amont ressemble assez à un ancien étang envasé, tandis qu'un bon dénivelé existe
en aval. Yvonne n'a pas vu ce moulin fonctionner. Sur le ruisseau entre Lervir et Kervenguy, en aval du lavoir de Kervenguy, un autre moulin a fonctionné, selon Yvonne.