mercredi 9 décembre 2015

PA ... trimoine mais presque !

Pa ... trimoine, mais presque ! *

* Clin d'oeil à Coluche et son "pa ... tibulaire, mais presque".

A l'invitation des élus concernés j'ai contribué à l'inventaire du petit patrimoine rural dans la commune.

En précisant à Mme Cavarec, chargée de l'élaboration d'une carte des relevés, le vendredi 6 novembre, que je n'étais pas absolument certain que tous les éléments patrimoniaux que je listais avaient encore une existence concrète ( n'étant pas passé voir certains depuis longtemps ), je ne pensais pas si bien dire.

En effet, en sortant de la mairie, je suis allé à Tréléon pour voir si le nouveau propriétaire des biens de Toussaint Madec ( corps de ferme et moulin ) avait progressé dans son intervention sur les vestiges du moulin. Rien de nouveau concernant le moulin. PAR CONTRE, j'ai constaté que :

1° On avait commencé à remblayer l'ancienne petite prairie en aval de la chaussée sur la rive droite du ruisseau. C'est une zone humide classée dans l'inventaire de 2014.

Simple remblai occasionnel ou 1ère étape d'une action de plus grande envergure ?

2° En tout cas, la fontaine avait été ensevelie du même coup sous une très épaisse coulée de terre !

Deux agressions patrimoniales "pour le prix d'une". Et dans un contexte d'inventaires, juste terminé pour les zones humides, encore en cours pour le petit patrimoine.

En 1794, L'Abbé Grégoire, un précurseur dans la protection du patrimoine , avait créé le mot "vandalisme" pour désigner une agression contre un élément du "patrimoine collectif dont la sauvegarde est d'utilité publique". Et il avait retenu trois principaux motifs :" l'ignorance,l'insouciance et la filouterie". Si l'ignorance peut être assez facilement corrigée il n'en va pas de même pour l'insouciance, et encore moins pour la filouterie ; un filou étant une personne malhonnête, sans scrupules.

J'ai déjà eu l'occasion de présenter au regretté François Guiavarc'h, lors de sa visite au four à pain de Trébaol il y a 3 ans, l'intérêt de la prise en charge par la commune du lot patrimonial moulin + fontaine de Tréléon.

Voir aussi sur le blog d'Aquavie/Dour Bew les deux textes concernant le Moulin de Tréléon :

Au moulin de Tréléon avant l'adduction d'eau - 13 fèvrier 2011.

Le moulin de Tréléon - 2 décembre 2012.

Dans son livre "La France du patrimoine - Les choix de la mémoire" 1996, Marie-Anne Sire dit ceci au sujet du patrimoine rural :

"Les débats et recherches engagés par les historiens, les géographes et les ethnologues sur la signification de l'héritage que l'on souhaite transmettre aux générations futures induit d'importantes inflexions dans la politique de protection patrimoniale : trop longtemps concentrée sur des monuments de qualité exceptionnelle isolés de leur contexte, l'attention s'élargit ainsi aux autres éléments sans doute moins spectaculaires, mais essentiels pour comprendre la qualité du tissu social et architectural d'espaces plus larges.


On redécouvre l'intérêt et l'urgence de protéger notamment des éléments d'architecture rurale comme les pigeonniers, les lavoirs ou les moulins, jusque-là promis à la disparition du fait de leur moindre utilité.

Leur sauvegarde mobilise désormais l'opinion soucieuse de conserver ces repères dans un paysage qui se désertifie et ces témoins d'un autre âge, gardant la trace de modes de vie et de savoir-faire, appelés à disparaître."
M Bernard Briant adjoint à l'urbanisme et à l'environnement a été alerté. Il a lancé la procédure règlementaire et le remblaiement devrait être enlevé.

La fontaine retrouvera-t-elle vie ou sera-t-elle définitivement éradiquée lors de l'enlèvement du remblai ? Car de tels travaux sont exécutés, comme le remblaiement, par des engins qui ne permettent pas une exécution fine. De plus s'il était relativement facile de "benner" la terre sur l 'ancienne petite prairie depuis le champ attenant plus élevé de quelques mètres il sera beaucoup plus problématique de l'enlever étant donné le dénivelé justement et l'absence d'accès alternatif. Une chose est sûre, l'espace concerné va être bien "charcuté" durant l'opération. D'où nos inquiétudes concernant la récupération possible de la fontaine, privée rappelons-le ...

Dans le même ordre d'idées, à Feunteun vervet, un lavoir déjà bien malmené a été recouvert de terre lors de la réfection de la chaussée attenante, malgré la réaction immédiate d'un riverain. Le remblai devrait là aussi être enlevé.


Ces deux exemples confirment, si besoin était, la nécessité d'un inventaire de ces éléments patrimoniaux de "moindre utilité" en même temps que "l'intérêt et l'urgence de (les) protéger".
L'exemple de Feunteun vervet pointe de plus le fait que, dans le domaine public, la maltraitance et/ou l'éradication de nos modestes éléments patrimoniaux est autant possible que dans le domaine privé. Mais l'autorité publique, municipale par exemple, peut être alors en cause. En effet les agents qui interviennent pour des maintenances ou réfections devraient être dûment instruits de l'existence d'éléments patrimoniaux dans l'espace de leurs interventions et de la nécessité de les sauvegarder.

Après ces informations déprimantes une perspective plaisante quand même : les services municipaux devraient intervenir sur les abords de la fontaine et du lavoir de Trébaol afin d'en faciliter l'accès. Une première demande dans ce sens avait été formulée au début du printemps 2004 par des riverains pour compléter le nettoyage du site qu'ils venaient d'effectuer. Nous suggérons une intervention similaire sur la fontaine et le lavoir de Ménézig gwen / Guelmeur qui avaient été dégagés à la fin de l'hiver 2007 puis oubliés ensuite.



Aquavie/Dour Bew